Les langues s’agitèrent, des sourirent naquirent sur les lèvres, des grimaces en déformèrent d’autres. La mini-bleue était de retour, et les avis déjà divergeaient. Et comme une Reyne en son Royaume, Isaure posa le pied à terre. Elle était à la maison, enfin. Unique survivante des quatre enfants du Duc, il lui manquait certes la légitimité mais personne ici ne doutait de la paternité du Brienne père : la jeune fille était son portrait craché. Seuls peut-être ses jolies boucles et le nez légèrement retroussé devait lui venir de sa mère.
Une fois sa précieuse monture confiée au palefrenier, Isaure se dirigea vers le château, suivie de Madeline. Elle logeait depuis quelques temps à plusieurs lieux de Brienne, sur les terres du baron de Digoine qui l’avait généreusement – et sans doute avec quelques arrières pensées – accueillie en son domaine. Elle profitait d’une courte absence de celui-ci pour rendre visite à sa belle-sœur et visiter ses propres terres. IL lui semblait que souvent Morvilliers l’appelait. Elle rêvait presque toutes les nuits qu’elle arpentait ses couloirs sombres, et qu’elle débouchait bientôt dans la chambre qui aurait dû être attribuée à sa Marraine. C’était toujours à ce moment-là qu’elle se réveillait en sursaut. Morvilliers… L’unique héritage qu’elle avait reçu de son père en sus de son nom. Ah qu’elle était fière d’être une Wagner. Elle s’efforçait de s’en montrer digne, d’être à l’image de ce père tant aimé et pourtant inconnu. Elle ne savait de lui que les récits qu’on voulait bien lui conter, mais elle aimait se dire qu’Il guidait ses pas, qu’elle le connaissait bien mieux qu’eux. N’était-elle pas une partie de lui ?
C’était toujours un plaisir de venir à Brienne où elle avait en partie grandi et où son père avait vécu avant elle. Et sans qu’elle n’y prête attention, ses pas la menèrent dans le grand salon du château.
Fais donc prévenir la duchesse que je l’attends dans ce salon, et fais ensuite venir des cuisines quelques rafraîchissements.
Elle venait d’interpeller une jeune servante blonde qu’il ne lui semblait pas connaître et sur laquelle elle ne s’attarda pas.
N’est-il pas bon de rentrer à la maison ma chère Madeline ? Peut-être souhaitez-vous aller visiter votre famille ? Je vous accorde votre journée de demain.
Et sans plus faire attention au reste, Isaure, installée dans un bon fauteuil conversa avec sa chambrière.